Oh la la
.. ma tête
. mon ventre
En me réveillant ce matin, je compris de suite combien j'étais
malade.
L'estomac complètement retourné, des nausées, des reflux
gastriques, des frissons, le nez pris, des flageolements, et le comble de tout,
une fièvre carabinée.
Ce n'était pourtant pas le menu de réveillon qui avait pu me mettre
dans cet état !
Et puis le souvenir me vint de cette tournée imprévue avec le
Père Noël.
Pris par la frénésie magique de déposer tant de cadeaux,
d'imaginer tant d'enfants heureux, tous ces milliers et milliers de sourires,
toutes ces joies émerveillées, nous nous sommes laissés
aller à déguster un chocolat ici, un petit morceau de gâteau
là, un autre et un autre encore. Sans oublier de temps en temps un petit
verre laissé à notre intention. Dans cette nuit magique, comment
refuser ces petits présents, ces touchantes attentions ?
J'imagine (et j'espère ) que le Père Noël est comme moi aujourd'hui, en piteux état.
Mélusine prévenue de l'impossibilité où j'étais de la rejoindre comme convenu, m'avait prodigué moult conseils : rester couché au chaud et surtout n'avaler juste qu'un bon bouillon bien chaud pour me remettre. Elle passerait me voir dans la soirée.
En arrivant tout à l'heure, elle me trouva avachi sur un canapé,
enroulé dans une couverture, les yeux blêmes, la mine battue et
les joues tristes, les cheveux en bataille et un livre à peine entamé
sur les genoux.
Rapidement, elle s'interrogea sur les odeurs flottant dans l'air.
" Cela sent curieusement autre chose qu'un simple bouillon. Tu n'aurais
tout de même pas osé faire de la cuisine, mon bon Merlin ? "
La bouche pâteuse, je lui répondis que pour faire un bouillon,
il fallait bien tout de même un minimum d'ingrédients.
" Tu m'autorises à aller voir ta cuisine ? "
" Bien sûr, mais ne fais pas attention au désordre. Je n'avais
pas bien la force de ranger mon chari-vari. "
Lorsqu'elle revint vers moi, elle avait de la difficulté à retenir
son rire.
" Dis-moi, c'est bien une poularde pochée, que j'ai rencontrée
dans ta cuisine ? Ainsi qu'une sauce veloutée à la crème
et aux morilles ? Pour un moribond, tu te soignes ! "
" Tant qu'à faire un bouillon, autant qu'il soit bon. Et puis c'est
Noël, tout de même. Alors j'ai juste grignoté un tout petit
morceau, histoire de vérifier la cuisson, avant d'avaler un très
grand bol de bouillon. Qui m'a fait du bien, d'ailleurs, et je te remercie de
ce conseil avisé. "
Evidemment Mélusine se régala d'une petite demi-poularde. Elle
n'était pas malade, elle.
Pour essayer de ne plus l'entendre se pourlécher, je repris un bol de
bouillon.
C'est bon aussi, le bouillon.
Poularde de Bresse pochée, et sauce veloutée crème et
morilles.
(recette testée issue des lectures de la Mère Blanc, de Paul Bocuse
et de Chef Léon)
Brider la poularde et la pocher dans un bouillon très corsé en
légumes (poireaux, oignons, ail, carottes, navets, céleri, bouquet
garni).
A la première ébullition, passer à feu doux, couvrir et
laisser 1h30 à 2 heures.
Faire mariner 25 g. de morilles sèches dans du lait.
Faire fondre dans une casserole 20 grammes de beurre, lui mélanger 15 grammes de farine, cuire 10 minutes et atteindre une légère coloration noisette.
Laisser refroidir, puis délayer peu à peu avec 3 décilitres
du fond de pochage de la poularde très chaud. Faire bouillir en remuant
avec un fouet à sauce jusqu'au moment où l'ébullition se
manifeste; laisser alors cuire 10 minutes très doucement.
Mettre en plein feu et réduire de moitié tout en remuant à
la spatule. La sauce étant devenue trop épaisse, rétablir
à consistance normale en lui additionnant de la crème fraîche
épaisse, environ 1 décilitre.
Ajouter alors les morilles égouttées, et laisser au bain-marie
à feu doux. Vérifier l'assaisonnement.
Juste avant de servir, lier le velouté avec 2 jaunes d'ufs détendus
à la crème fraîche. Surtout ne pas remettre sur le feu.
Découper la poularde en la débarrassant de sa peau.
Si vous êtes à la diète, ne consommer que le bouillon, et offrir la poularde à la crème et aux morilles à vos voisins.