Chronique 29 (10-03-2002)


Bientôt parvenu au château de Sire Guillaume, je me demandais encore ce que j'allais pouvoir lui dire.
Son épouse, une excellente amie de Mélusine, était venue la trouver en larmes pour se plaindre des chicaneries et du désamour de son mari, et c'était moi, évidemment, qui était chargé d'essayer de convaincre le seigneur de changer d'attitude.
En évitant de me retrouver au fond des oubliettes.

Le manège d'un petit oiseau de toutes les couleurs me détourna de mes soucieuses réflexions. Dans une clairière jonchée d'éclats de pommes, il se gavait de pépins.
" Mon pauvre ami, si tu manges trop tu ne pourras plus t'envoler. " lui dis-je.
" A quoi me sert de voler, si je suis bien ici ? "
" Parce que c'est ton destin d'oiseau, de voler au sommet des arbres, de nous étonner par ton chant clair, et d'aller de vallons en vallons. Car tu n'es ni serf ni ver de terre attaché à ton lopin de terre . "

Après l'avoir aidé à accomplir sa destinée, je ramassais tout de même quelques morceaux de ces délicieuses pommes, tout en me demandant pourquoi il y en avait tant d'éclats dans cette clairière.
C'est à la ferme où l'on m'accueillit gentiment que j'en eus l'explication.
Un archer étranger, venu participer à un tournoi, ne s'entraînait au tir que sur des pommes. Une coutume de son pays, probablement.
Mais le fermier me parla aussi, tout en me faisant goûter son cidre, de son souci avec un renard, qui rôdait depuis quelque temps un peu trop près de sa porcherie.
Le cidre aidant, je ne pus qu'accepter de détourner un peu mon chemin pour rencontrer ce renard, à qui j'expliquais que sa destinée n'était pas de manger du porc, et que lorsque les poulaillers étaient vides, il se devait d'aller chercher plus loin sa pitance, plutôt qu'essayer de transformer ses nécessités alimentaires.

Enfin arrivé au château, je me contentais de raconter ces diverses rencontres à Sire Guillaume, en lui faisant comprendre qu'il devait lui aussi assumer et accomplir sa destinée, et ne pas rester à s'aigrir dans son château.

Après avoir assisté au tournoi, je fis un bout de chemin avec l'archer Tell, qui rentrait en son lointain pays d'Helvétie. Il m'expliqua que ses entraînements de tir sur les pommes n'était pas une coutume, mais une récente pratique toute instinctive. Dont il espérait trouver un jour l'explication.

Enfin de retour dans ma chaumière, tout en préparant un petit plat de porc aux pommes et au cidre, je rendis compte de ma mission à Mélusine.
Celle-ci venait de son côté d'avoir des nouvelles : le sire Guillaume avait décidé, enfin, d'accomplir son destin et d'aller conquérir les îles Anglaises. Son épouse était enfin tranquille en son château.

" Mais je n'ai pas compris pourquoi elle me demande si je connais un bon serrurier ? "
Laissant cette question sans réponse, nous préférâmes déguster notre délicieux plat à la Normande.

FILET MIGNON DE PORC Pomme et Cidre, Cuit à l'étouffée
Recette de Léon " Chef Simon "

On aura seringué si on le souhaite avec du calvados

Poivrer à souhait. (Je ne sale presque plus ma cuisine)
Saisir dans un beurre noisette
Retourner sur chaque face
Débarrasser.

Sauter les quartiers de pommes qui serviront à la garniture.
Une simple coloration suffira.

Sauter aussi rapidement les dès de pommes qui entreront dans la composition de la sauce
Replacer les quartiers dans la poêle ainsi que le filet mignon
Flamber au calvados (Attention aux retours de flammes !)

Puis on mouille au cidre brut
Porter à faible ébullition.
Couvrir

On débarrassera les pommes pour leur éviter une sur cuisson fatale.

On jugera de la bonne cuisson par pression du doigt : ferme et souple !
Puis on débarrassera le filet mignon de la poêle

Pour confectionner la sauce.
On réduira le liquide de moitié au moins.
On mouillera au fond légèrement lié.

On réduira à nouveau. On crèmera et on portera à réduction à nouveau jusqu'à une consistance onctueuse et veloutée.
On y ajoutera alors les dès de pommes.
On replacera les morceaux de filet mignon dans la sauce.
La sauce est homogène .
Le sucré n'est pas prédominant et la chair garde sa spécificité animale tout en alliant un parfum fruité.
Servi ainsi, avec une timbale de semoule.