" Un peu de farine pour faire tenir la mayonnaise ? Heu
c'est effectivement
efficace pour la texture, mais en ce qui concerne le goût
. "
Ce jeune couple avait absolument tenu à m'inviter, bien que la jeune
Carole soit vraiment peu coutumière de la cuisine.
Et bien évidemment, ses préparations prenant mauvaise tournure,
elle chercha de l'aide. Mais qui donc lui avait conseillé de s'adresser
à Super-Cuistot ?
Son arrivée tonitruante en fracassant la porte d'entrée fit d'abord
choir et se briser le portrait de belle-maman accroché dans l'entrée.
Le chat de la maison, les poils tout hérissés, trouva rapidement
asile sous le lit de la chambre, non sans avoir, en passant, griffé désespérément
une jolie nuisette de satin.
Dans son habit fluorescent rouge et jaune, semblable à un maillot de
bain des années trente, Super-Cuistot tout en parlant très fort
et sur un timbre très aigu, ôte son chapeau bleu et sa houppelande
vert pâle. Sa logorrhée verbale mélange les noms des plus
illustres tables auxquelles il a apporté son savoir-faire : le prince
Edouard de Suresnes et la Reine de Sylsurie, le Président de Londonie
et Madame la Cardinale de Savoie.
Une épluchure malencontreusement abandonnée fut cause de sa chute à l'entrée de la cuisine. Mais Carole, le voyant étalé de tout son long, eut la présence d'esprit de lui verser un verre d'orangeade sur le visage pour le faire revenir à lui.
Et c'est avec de grands gestes, et des paroles éloquentes et pleines
d'assurance, qu'il rattrapa la mayonnaise avec une cuillère de farine,
tout en en saupoudrant toute la cuisine, et qu'il améliora l'insipide
goulash de porc avec de la gelée de groseilles et du sirop de Reblochon,
ce qui rendit le sol particulièrement collant.
Quant à l'odeur de brûlé due au torchon de cuisine enflammé
sur le gaz, elle se résorba assez vite grâce aux courants d'airs
organisés dans l'appartement. Dommage que la pluie en profita pour inonder
la moquette des chambres.
Au moment du départ, en se retournant, tout en s'apprêtant à descendre la première marche de l'escalier, pour saluer Carole avec son chèque en main et son sourire brillantiné, Super-Cuistot perdit l'équilibre et dévala les trois étages avec de grandes gesticulations et de grands cris désordonnés. Quelle belle sortie !
A la fin de ce repas expérimental, après lui avoir donné une excellente recette de goulash hongrois, j'assurai la jeune Carole qu'elle trouverait de meilleures aides culinaires sur un forum de discussion spécialisé en cuisine. Il s'y trouve aussi, comme partout, quelques guignols, mais inoffensifs, noyés dans la masse des participants de qualité.
Szekler Gulyás (Goulasch à la Szekelaise)
(transmise par Ian Hoare)
Proportions pour 8 personnes :
500 g d'épaule de porc
500 g de filet de porc
12 Oignons
1/2 c. à c. de Grains de carvi
3 c. à s. de Saindoux
1 kg de Choucroute crue
1 Gousse d'ail
300 ml Crème fraîche
Sel
1 c. à c. de Paprika (noble doux)
1/2 c. à s. d'Aneth hachée
NB. La crème fraîche doit être de bonne qualité, faite avec du ferment lactique. Pour un vrai szekler goulasch, on doit utiliser les deux différents types de porc, impérativement frais, et non salés.
Couper le porc en gros morceaux d'à peu près 50 g chacun. Hacher
l'oignon, l'ail, l'aneth, et écraser les graines de carvi.
Dans une cocotte à fond épais, faire fondre le saindoux (comme
pour presque toutes les recettes hongroises, on peut substituer d'autres graisses
animales, et éventuellement du lard gras, coupé en morceaux et
fondu dans un peu d'huile). Y ajouter le porc, l'oignon, l'ail, les grains de
carvi et l'aneth. Ajouter un peu d'eau, porter à ébullition, couvrir
et laisser mijoter 15 minutes.
Pendant ce temps, bien laver la choucroute et l'égoutter.
Une fois la première cuisson des viandes terminée, ajouter la
choucroute avec le paprika et du sel. Porter de nouveau à ébullition,
couvrir, et laisser mijoter jusqu'à ce que la choucroute soit bien tendre.
Ajouter alors la crème fraîche, remuer, porter à ébullition
et corriger l'assaisonnement.
Servir dans un plat creux chauffé.
On peut ajouter un peu de crème fraîche chauffée à
part, et versée sur la préparation.
Ce plat, comme plusieurs autres recettes à base de chou, se réchauffe
très bien, et peut se conserver stérilisé en bocaux.