Chronique 32 (31-03-2002)


Cette forêt, curieusement, je ne l'avais encore jamais traversée. Son silence était impressionnant : juste le crissement des feuilles sèches sous les pas, et le léger bruissement de ses frondaisons.
Sortant du couvert de ses arbres denses et sombres, je longeais un champ dont les tiges de blés portaient des épis d'or. Les vergers, au-delà, étaient couverts de petits pains dorés et de croissants; les jardins regorgeaient de saphirs et de rubis, au lieu de fruits et légumes ; et la petite rivière franchie par le petit pont de pierres, en parvenant au village, écoulait un vin rouge bien gouleyant aux premières effluves que je respirais.

Sur la place, au pied d'un arbre centenaire, un vieillard chenu était paisiblement assis, les deux mains posées sur sa canne. Mais le regard sombre et voilé n'était pas celui d'un homme heureux, ayant à sa disposition tant de richesses.

" Bien le bonjour ! Vous me semblez bien triste et songeur, malgré l'abondance de richesses dont votre village dispose ? "
" Ah petit ! Ce ne sont que richesses trompeuses. Comment faire cuire la soupe, lorsqu'il n'y a plus d'eau, mais que du vin ? Et ces pommes de terre en or, crois-tu qu'elles soient nourrissantes ? Poules et lapins, eux, sont morts depuis longtemps."
" Tout du moins, vous pouvez aller acheter ce que vous voulez à la ville, ou dans les autres villages ? "
" Croyez-vous ? Le seigneur nous l'a bien vite interdit, et toutes ces babioles brillantes ne peuvent sortir de ce village. Il paraît qu'elles sont diaboliques. "
" Vivement qu'un magicien arrive et vous délivre de ce maléfice."
" En attendant, venez à la maison. Mon fils nous a rapporté des cailles, attrapées de l'autre côté de la montagne. Ainsi que quelques fruits. Vous nous ferez bien de l'honneur."

Tout en dégustant de surprenantes cailles aux mandarines, nous passâmes la soirée à discuter de ces mauvais sorts qui parfois s'abattent brutalement sur de paisibles villages.
Une vieille femme non secourue dans la forêt, un chemineau éconduit pour un morceau de pain, un couple de jouvenceaux poussés à la pire extrémité par leurs parents.
Tant d'évènements qui agacent fées et magiciens, capables de douloureuses vengeances.

Au matin, parvenu à nouveau en forêt, je m'arrêtais dans une clairière pour faire le nécessaire et lever le sortilège. Tout en vérifiant au fond de ma poche si j'avais bien toujours le petit présent pour Mélusine.

Cailles en crapaudine aux mandarines.

Zester deux mandarines. Passer ces zestes 1 minute à l'eau bouillante pour enlever l'amertume. Extraire le jus des mandarines.

Rôtir les cailles dans un peu de beurre à la cocotte durant 3 minutes.

Monter le feu et verser un mélange moitié jus de mandarine moitié porto blanc.
Couvrir aussitôt pour ne rien perdre de l'arôme.
Laisser mijoter 10 minutes.
Ajouter les zestes, dessus et dessous la viande, et finir la cuisson à couvert sur tout petit
feu.
Réserver les cailles. Laisser réduire la sauce puis filtrer. Lier avec un beurre manié.