La haute voûte en ogive donnait aux voix du chur un relief particulier.
Les murs en épaisses pierres de taille étaient nus. Seule décoration
de l'immense pièce, les chapiteaux légèrement ouvragés.
Attablés à la longue table, une cinquantaine de moine mangeaient,
silencieux.
Et parmi eux, Bruno, que j'avais fini par retrouver ici.
Après une longue quête, j'avais retrouvé la trace de cet
ami disparu. Et le Supérieur de l'ordre, après m'avoir confirmé
sa présence, m'avait autorisé à manger avec eux, mais Frère
Bruno n'ayant pas souhaité rompre son vu de silence, je ne sut
pas la raison de cette retraite.
Mais ce qui m'étonnait le plus, c'était qu'il se contentât
de ces repas insipides, lui naguère si gourmand.
Après ces frugalités, il me fit l'honneur d'une visite du monastère,
y compris la cuisine.
Quel calme, quelle sérénité, quel silence, mais aussi quel
ennui
Après la visite, je me retrouvais seul, chacun étant retourné
à son moment de retraite solitaire. Et mes pas naturellement me ramenèrent
à la cuisine. N'ayant trouvé aucune boisson à ma convenance
dans le réfrigérateur, j'ouvrais les placards les uns après
les autres lorsque je remarquai, au fond du placard à balais, une seconde
porte. L'ayant ouverte, par curiosité, je m'avançais dans un petit
couloir circulaire aboutissant à un escalier en colimaçon. Au
bas de celui-ci, une nouvelle porte.
L'entrouvrant avec prudence, je jetais un coup d'il : c'était une
autre cuisine, plus petite, mais aussi plus active, plus parfumée d'odeurs
diverses, plus bruyante aussi. Des moines, l'air réjoui, commentaient
avec force gaieté leurs activités culinaires.
Au centre, évidemment, Frère Bruno donnait les ordres, vérifiait
la bonne exécution des choses, et ne manquait pas de reprendre même
le Supérieur :
" Ta brunoise n'est pas assez fine. Et rappelle-toi, tu fais suer à
feu doux. Pas comme l'autre fois. "
Ayant oublié toute prudence, j'avais dû trop avancer la tête et il me remarqua.
" M'étonne pas que tu nous ais découvert, sacré gône. Les odeurs t'auront sûrement aidé. Viens donc boire un verre avec nous. "
Nous discutâmes un bon moment, et il me fit bien rire en m'expliquant ses négociations ave le Supérieur pour l'ouverture de cette seconde cuisine.
" Toi qu'est un bec sucré, ça a dû aussi te manquer l'absence de dessert au repas. Tiens, en attendant nos expériences de poulet en papillotes, je vais te faire goûter une petite chose. Mais c'est pas une tarte aux pralines !!!"
Et en préparation aux agapes du soir, je m'amusais la bouche avec un chaud-froid de myrtilles.
500 g. de myrtilles, le jus d'1 citron, 150 g . de sucre, 30 cl. d'eau, 1 c. à s. de gin, 25 cl. De crème glacée à la vanille, 30 g. d'amandes effilées.
Lavez soigneusement les myrtilles, épongez-les.
Faites griller les amandes à sec.
Versez le sucre et l'eau dans une casserole, ajoutez le gin et le jus de citron.
Faites cuire 5 minutes.
Plongez-y les myrtilles puis laissez-les cuire pendant 5 minutes à feu
très doux. Laissez refroidir.
Préparez quatre belles boules de crème glacée.
Dressez les myrtilles au sirop dans des coupelles individuelles. Disposez au
centre de chacune une boule de glace.
Parsemez d'amandes grillées et servez de suite.