Chronique 6 (6-10-2002)


La semaine de travail avait été rude pour tous les compagnons, et ils avaient décidé de rester ensemble chez la Mère de la Guille, ce samedi soir, pour fêter le départ de Gaspard. Ayant terminé son tour de France, il s'apprêtait à rentrer au pays, revoir enfin ses montagnes et ses parents.
Et Charles avait délaissé son établi et ses outils d'ébéniste pour se mettre aux fourneaux et préparer une spécialité de son pays. Sous le regard attentif de la Mère, toujours curieuse des méthodes culinaires différentes de ses propres habitudes.

" Dis-donc Bourguignon la Patience ! C'est pas avec des copeaux de bois, que tu nous as mijoté ce ragoût. Où as-tu donc appris à cuisiner comme ça ? "
Charles expliqua à ses compagnons que c'était le seul plat qu'il savait faire, à force de regarder faire la Margot, celle qui l'attendait au pays. Il était bien plus à l'aise à travailler le bois, à sentir de ses mains les veines du chêne ou du merisier, à trouver comment bien assembler mortaises et tenons.
Son sourire nostalgique, son regard manifestement parti ailleurs, montraient suffisamment qu'il était à ce moment-là à mille lieues du ragoût ou des pièces de bois.

" Bourguignon ! La Louise, faudra peut-être lui en parler aussi un jour de ta Margot, non ? "
" Tu crois que c'est facile ? Bien sûr que j'ai toujours voulu lui dire, mais … pas simple de trouver le bon moment, et les mots. "

La Mère vint poser la main sur son épaule.
" Mais en même temps, cela sera aussi plus facile pour la Louise de te parler de son Jeannot. Il est parti en mer, au bout du monde, mais il va bientôt revenir. "
" Et Margot ? Tu crois, la Mère, que je dois lui dire ? "
" En retrouvant Margot, soyez simplement heureux. Ne lui dis rien, et ne lui demandes rien non plus …
Et ton plat succulent, on peut en reprendre un morceau ?"

Quelques années plus tard, lorsque la Louise et le Jeannot s'établirent dans une petite auberge des bords de Saône, une des spécialités du menu fut le " Bourguignon ".

BŒUF BOURGUIGNON
Recette transmise par Michèle Morin

Viande de bœuf : 600g de macreuse - 600 g de paleron - 600 g. de gite
Le tout en morceaux de 5cm environ.

Pour la marinade :
2 bouteilles de vin rouge assez corsé
200 g de carottes, 200 g d'oignons et une petite branche de céleri : le tout épluché et émincé fin.
2 gousses d'ail coupées en2 et dégermées
1 bouquet garni ( 2 feuilles de poireau, 1 de laurier; 1 branche de thym et du persil plat avec ses queues)

En plus pour la cuisson :
5 ou 6 tomates ou suivant la saison l'équivalent en conserve
1 grosse pomme de terre Bintje
1/2 litre de bouillon de pot-au-feu

Garniture :
400g d'oignons grelots
400g de champignons de Paris ou autres en saison ou 100g de champignons secs
150g de poitrine fumée

Marinade
Mettre la moitié de la viande dans un plat profond, Répartir les légumes. Mettre le reste de la viande. Couvrir largement avec le vin. Laisser mariner de 3 à 5 jours en retournant le tout toutes les 24h.

Préparation
Au moins 6 heures avant le repas sortir la viande de la marinade et éponger soigneusement les morceaux. Passer la marinade et récupérer les légumes.

Allumer le four : 220°C.

Saler et poivrer chaque morceau de viande. Dans une cocotte en fonte pouvant aller au four, faire fondre une grosse cuillerée de graisse de canard ou d'oie (ou de l'huile !) et faire bien dorer la viande en plusieurs fois. Il faut environ 5 minutes pour chaque "couche". Au fur et à mesure, réserver les morceaux sur une assiette.
Enfin, mettre les légumes de la marinade dans la cocotte et les faire suer et un peu rissoler en grattant le fond de la cocotte.
Les enlever. Remplir la cocotte avec alternativement les morceaux de viande et les légumes.
Verser la marinade et le bouillon : il faut que tout soit bien recouvert. Mettre à feu moyen jusqu'à ébullition et laisser à petits bouillons une vingtaine de minutes.
Ajouter les tomates et la pomme de terre en petits morceaux. Mélanger un peu.

Couvrir et mettre au four. Vérifier au bout d'une dizaine de minutes que le liquide bouillotte doucement et descendre la température du four à 150°.
Laisser cuire doucement au moins 4 heures en baissant encore le four jusqu'à 130° au bout de 2 heures et en vérifiant environ toutes les heures le bouillottement et le niveau du liquide.

1 bonne heure avant l'apéritif :

Mettre les champignons dans l'eau s'ils sont séchés.

Éplucher les oignons grelots, les mettre en une seule couche au fond d'une sauteuse avec un noix de beurre fondu juste chaud. Les enrober, les faire un tout petit peu rissoler à feu moyen. Verser de l'eau à hauteur des oignons. Poser sur l'eau une rondelle de papier sulfurisé à peine du diamètre de la sauteuse et laisser bouillir en surveillant et en remuant de temps en temps pendant 20 minutes : à la fin, il n'y a plus de liquide et les oignons sont régulièrement dorés.

Pendant ce temps, éplucher les champignons .. s'ils sont frais ! Les égoutter s'ils sont secs.! Les faire revenir dans une poêle anti-adhésive sans matière grasse jusqu'à ce qu'ils ne rendent plus d'eau.

Découenner et enlever les cartilages de la tranche de poitrine fumée. La détailler en tout petits lardons (1/2 cm de côté). Faire bouillir de l'eau et les blanchir 5 minutes. Bien les égoutter.

Mettre les champignons avec les oignons Faire revenir les lardons dans la poêle et les ajouter au mélange oignons-champignons.

Sortir la cocotte du four. Dans la sauteuse-cocotte de service, répartir morceaux de viande et mélange oignons-champignons-lardons.

Au-dessus d'une terrine, verser dans le moulin à légume le mélange vin-bouillon-légumes qui reste dans la cocotte. laisser égoutter puis mouliner environ la moitié des légumes. Bien mélanger. Si la sauce est encore trop liquide, continuer à mouliner. Il faut obtenir une sauce qui "nappe".
Vérifier l'assaisonnement en sel et poivre et verser dans la sauteuse. La couvrir, la mettre sur feu très doux et la garder à tout petit mijotage...
jusqu'au moment de servir votre "boeuf bourguignon" accompagné de pomme de terre fermes (rattes par exemple) très cuites à la vapeur pour qu'elles restent bien entières mais puissent s'écraser un peu dans la sauce.