Un laiteux quartier de lune était déjà levé en ce
début d'après-midi, parmi les nuages ébouriffés.
Parfois un rayon de soleil réchauffait les branches humides de la forêt
de hêtres, éclaboussant les couleurs dorées de l'automne,
et les oiseaux en profitaient pour reprendre leurs conversations égayées.
Lorsque j'arrivai devant la maison de mon ami Loup Gris, il était assis
sur le perron, la tête enfouie dans les pattes, comme n'importe quel homme
ayant atteint le fond du gouffre du désespoir.
" Tu te rends compte, Merlin ! La carbonade préparée pour
Chaperon, avec de la Chimay, du pain d'épice et de l'amour : carbonisée,
la carbonade ! Carbonata !!!"
Pendant que la cocotte en fonte ronronnait sur un petit feu, Loup Gris chantonnait
tout en poussant la poussière sous les tapis, arrangeant le bouquet
de fleurs, ordonnant son intérieur en attente de sa belle.
Lorsqu'il entendit les coups de feu !
C'était encore ce maudit chasseur encore et toujours sur ses traces.
Loup Gris se dépêcha de courir à travers bois pour détourner
le chasseur de son havre de paix et l'entraîner très loin de
là.
" Et tu comprends, Merlin, j'étais énervé, pressé
de rentrer terminer mes préparations. Je ne pouvais pas, comme d'habitude,
passer deux jours à le promener dans la forêt. Alors je me suis
permis d'utiliser un de tes sortilèges : je l'ai transformé
en carcajou. Tant pis pour lui. "
" En carcajou ? C'est vrai que c'est pas très gentil, mais cet
épisode regrettable ne justifie tout de même pas ce désespoir.
"
" Sauf que pendant ce temps, ma carbonade était restée
sur le feu. Et en a profité pour carboniser. "
" Chaperon ne vient que ce soir ? Tu as largement le temps de préparer
autre chose. Voyons voir ce que j'ai dans ma besace ? Tiens, un joli filet
de buf. Tu peux le faire en cuisson lente, accompagné de cèpes,
j'en ai vu dans le bois en arrivant. Ce qui te laisse le temps de finir de
ranger ton fourbis, et même de prendre un bain aromatisé aux
herbes. "
Une fois son moral revenu, et la cuisson mise en route, je laissais Loup Gris à ses préparatifs et je repris mon chemin, après avoir tout de même trinqué à notre amitié. Tout en restant sur mes gardes : le carcajou n'est pas un animal très sympathique, et autant éviter de le croiser sur sa route.
Filet de boeuf à la sauce au vinaigre balsamique
Annemarie Wildelsen. Cuisson douce de la viande à basse température.
Ed. Electrolux
Pour 4-5personnes
1 échalote, 1 gousse d'ail, 600-700 g de filet de buf, sel et poivre du moulin, 1 c. à s. de beurre à rôtir, 1 c. à c. de purée de tomates bien pleine, 100 ml de vin rouge corsé, 1/4 1 de fond de veau, 1 c. à c. de grains de poivre rouge en saumure, 2 c. à s. de vinaigre balsamique, 100 g de beurre.
Préchauffer le four à 80 degrés. Glisser en même
temps un plat au four.
Peler et hacher finement l'échalote et l'ail.
Saler et poivrer le filet de boeuf Saisir dans du beurre très chaud
de toutes parts (les extrémités aussi) pendant 5 minutes. Déposer
immédiatement sur le plat préchauffé et continuer la
cuisson au four pendant 1 1/4 heure (saignant) à 1-3/4 heure (à
point, rose) à 80 degrés.
Etuver dans le fond de cuisson l'échalote, l'ail et la purée
de tomates. Mouiller avec le vin rouge et laisser réduire fortement.
Ajouter le fond de veau et laisser réduire le tout à 150 ml.
Passer la sauce au tamis et garder en attente dans une petite casserole.
Rincer les grains de poivre à l'eau tiède. Ajouter avec le
vinaigre balsamique à la sauce.
Juste avant de servir, donner un bouillon à la sauce. Incorporer le
beurre par petits morceaux. Assaisonner de sel et poivre. Découper
le filet de boeuf et dresser la viande sur les assiettes préchauffées
et napper avec un peu de sauce. Servir immédiatement.